Sur chaque quatrième de couverture des livres de Palahniuk, il y a ce petit texte : « Un livre de Palahniuk ne se résume pas, c’est déjanté, subversif, incroyablement lucide. » Et j’ai envie de dire que tout est là effectivement.
Mais d’où t’es venue l’idée de lire ce livre ?
Ayant découvert un jour que Palahniuk était l’auteur de l’excellent Fight Club, j’ai décidé de lire ses autres romans pour découvrir cet univers si particulier. Il y a donc déjà eu Berceuse, Monstres Invisibles, Choke et Le Festival de la couille et autres histoires vraies.
La quatrième de couv :
L’un se nomme Saint Descente de Boyaux, l’autre Dame Clocharde, un autre encore Duc des Vandales… Ainsi de suite jusqu’à l’Agent Cafteur et le Chaînon Manquant. En tout une vingtaine de volontaires ayant quitté abruptement le quotidien sans laisser la moindre trace. L’annonce, discrète dans le journal, leur promettait de se retrouver au secret, sans contact avec l’extérieur, afin d’accoucher enfin du chef-d’oeuvre qu’ils portaient en eux. Ce qui était censé être un refuge se révélera un imparable piège. Les mêmes qui affirmaient venir pour écrire avaient tous besoin, pour de multiples raisons plus inavouables les unes que les autres, de fuir la justice et les hommes… Tous à la fin – ou presque ! – auront en effet une histoire à raconter… Ce ne sera certainement pas celle à la laquelle ils pensaient.
Mon avis :
Palahniuk ne prend pas de gants quand il décrit les maux de notre société actuelle. C’est cru, vulgaire parfois, à la limite de l’écoeurant, mais il touche juste. En plein dedans à chaque fois.
Dans ce roman, il se livre à un petit huit-clos qui met en scène treize paumés, venus là soi-disant pour écrire un chef-d’oeuvre, mais qui ne cherchent finalement qu’à se cacher de leur passé. Une fois à l’intérieur, plutôt que de se lancer et de tenter la moindre ligne, ils préfèrent tout bonnement endosser le costume de la victime et vont donc se laisser mourir de faim, s’entretuer, s’entredévorer afin d’offrir le meilleur récit possible de leur supposé captivité lorsqu’ils seront enfin libérés. Mais ils ne sont bien sûr captifs que de leurs propres peurs, leurs propres limites.
Avec pour fil conducteur l’histoire de cette captivité, Palahniuk nous offre un poème pour chaque personnage et une nouvelle écrite par chacun des participants qui explique le pourquoi de leur fuite. Au fur et à mesure des pages, c’est le monde de la télé (« transformer ta vie en quelque chose que tu peux vendre« ), les méthodes new-age, le tout-information et la globalisation, la jet-set et tout un pan de la culture américaine qui se prend un coup à l’estomac.
Peut-être pas le meilleur Palahniuk, mais sa liberté de ton met toujours aussi mal à l’aise.
A lire, un entretien avec l’auteur sur fluctuat.net.
Extraits
Un premier extrait de ce livre a été posté dans l’extrait du mardi.
« La raison pour laquelle ce pays est incapable de gagner une guerre, c’est qu’on passe notre temps à se battre entre nous au lieu de s’attaquer à l’ennemis. » p.282
« Un fusil. Une lunette de visée. Une bonne cible et un cortège de véhicules.
C’est ce qu’il a appris étant gosses, en regardant les infos à la télévision, chaque soir. «Comme ça, on ne m’oubliera pas», dit le chef.
Comme ça, sa vie ne sera pas gâchée.
Il dit : «C’est mon plan B.» » p.364
« Je ne vois guère de différence entre désosser un lapin et un blogueur désagréable qui raconte sur le Net que ta costatine al finocchio manque de marsala. » p 368
« Ces pires périodes de votre vie, ces moments dont vous êtes incapables de parler, ils vous font pourrir par l’intérieur. […]
Mais les histoires que vous digérez, que vous avez la force de raconter – celles-là vous permettent de contrôler votre passé. De lui donner forme, de le travailler. De le maîtriser. Et de l’utiliser pour votre bien. » p.560
Détails :
Auteur : Chuck Palahniuk
Editeur : Gallimard / Folio Policier
Date de parution : 02/05/2008
594 pages
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