Dans la sélection actuelle pour le Goncourt, ce quatrième livre sur Marie m’aura, pour ma part, un peu déçue !
La quatrième de couv :
La robe en miel était le point d’orgue de la collection automne-hiver de Marie. À la fin du défilé, l’ultime mannequin surgissait des coulisses vêtue de cette robe d’ambre et de lumière, comme si son corps avait été plongé intégralement dans un pot de miel démesuré avant d’entrer en scène. Nue et en miel, ruisselante, elle s’avançait ainsi sur le podium en se déhanchant au rythme d’une musique cadencée, les talons hauts, souriante, suivie d’un essaim d’abeilles qui lui faisait cortège en bourdonnant en suspension dans l’air, aimanté par le miel, tel un nuage allongé et abstrait d’insectes vrombissants qui accompagnaient sa parade.
Nue est le quatrième et dernier volet de l’ensemble romanesque MARIE MADELEINE MARGUERITE DE MONTALTE, qui retrace quatre saisons de la vie de Marie, créatrice de haute couture et compagne du narrateur : Faire l’amour, hiver (2002) ; Fuir, été (2005) ; La Vérité sur Marie, printemps-été (2009) ; Nue, automne-hiver (2013).
Mon avis :
Il y a quatre ans, je découvrais Faire l’amour. C’était plein d’étincelles et de tremblements dus à cette rupture entre le narrateur et Marie. Énigmatique Marie qui depuis le début de cette tétralogie fait courir notre narrateur de Paris au Japon, en passant par l’Italie. Ils ont fait l’amour, pas toujours ensemble, mais parfois en même temps ; ils se sont fuis ; ils se sont retrouvés. Ils ont attendus, enfin, lui, le narrateur, a beaucoup attendu. Une Marie toujours insaisissable.
Dans Fuir, le narrateur se demandait déjà « Serait-ce jamais fini avec Marie ? » Il semblerait que non. Ce dernier livre est toujours à la limite entre les retrouvailles et la rupture. Il y a, comme dans les autres romans, des phrases ciselées, au rythme parfait. Une scène, LA fameuse scène de la robe en miel, qui se suffit à elle-même, tant elle semble parfaite.
Mais… oui, mais…
Il y a ces répétitions, qu’on se dit voulu la première fois qu’on les rencontre. Puis qui finissent par totalement occulter le reste, les phrases si bien tournées, Marie qui virevolte, et les révélations de fin. Alors on referme le livre sur cette interrogation de Marie, offerte comme une récompense, comme une clé pour un futur plus apaisé, mais avec une petite déception pour n’avoir pas pu entrer totalement dans ce texte…
Extraits
Lire les premières pages sur le site de l’éditeur.
“… il avait trinqué doucement avec elle, faisant tinter délicatement les coupes l’une contre l’autre comme si c’était deux épidermes hypersensibles que l’on mettait pour la première fois en contact, comme deux lèvres qui se rapprochent et s’effleurent, premier baiser encore purement symbolique.”— Nue – Jean-Philippe Toussaint
“Je lui effleurais l’épaule en la rejoignant dans le jardin et je lui disais incidemment qu’à défaut de maillot de bain, elle pourrait mettre un chapeau – ça se fait, lui disais-je, quand on est à poil (et elle haussait les épaules, ne répondait même pas). Marie qui, toujours, réussissait à me surprendre et à me désarçonner, Marie, imprévisible, qui, quelques semaines plus tôt, à l’île d’Elbe, avait volé un abricot à l’étalage d’un magasin de fruits et légumes de la vieille ville de Portoferraio, et qui avait gardé longuement le noyau dans sa bouche, qu’elle avait suçoté rêveusement au soleil, avant de le coincer soudain contre le mur d’un passage ombragé du port pour plaquer brusquement ses lèvres contre les miennes pour se débarrasser du noyau dans ma bouche.”— Nue – Jean-Philippe Toussaint
Détails :
Auteur : Jean-Philippe Toussaint
Editeur : Minuit
Date de parution : 05/09/2013
176 pages
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Tu lis donc tous les goncourables ?
Oh non! J’ai vu après avoir terminé le livre qu’il était dans la liste.
Félicitations pour votre blog.
C’est vrai, Nue est un peu décevant, pris en lui-même… mais il reste quand même la légèreté du style de Toussaint, un tel plaisir de rythme, de sonorité.
En revanche, je trouve que c’est une très belle conclusion au cycle de Marie… ne serait-ce que par la dernière question, parfaite dans sa simplicité, et qui éclaire tellement le personnage de Marie.
Merci !
Oui, il y a ce style. Mais quand même. Après avoir patienté aussi longtemps, on en a que plus d’attentes… C’est peut-être là le problème…